Edward Sheriff Curtis est un photographe ethnologue américain (né en 1868 - mort en 1952). Il a eu comme ambition d'entreprendre l'inventaire photographique exhaustif de tous les Indiens des 80 tribus existantes.
Cette population indienne qui était estimée à plus d'un million d'individus au XVIIIe siècle était descendue aux alentours de 40 000 lorsqu'il débuta son projet. En fait, il ne s'intéressa guère à ceux qui présentaient des signes trop évidents d'acculturation. Il exigeait de ses modèles une certaine pureté des mœurs.
Son projet était soutenu par le grand industriel, financier et philanthrope new-yorkais John Pierpont Morgan et par le président Theodore Roosevelt, pour qui il entendait enregistrer «tous les aspects de la vie dans toutes les tribus demeurées à un stade primitif» afin d'immortaliser ce qui pouvait être sauvé de ces cultures sur le point de disparaître, dans leur forme originelle.
De 1907 à 1930, eut lieu une véritable course contre la montre. Parmi les tribus qu'il visita : les Kwakiutl Prairies et au pied des Rocheuses, les Hopis, les Pueblos et autres habitants du Sud-Ouest, les Blood, les Blackfeet et les Algonquins dans le Montana. Un journaliste écrivit : « Il devint un Indien. Il vécut, il parla indien ; il fut une sorte de Grand Frère Blanc. Il passa les meilleures années de sa vie, comme les renégats d'autrefois, parmi les Indiens. Il découvrit d'anciennes coutumes tribales. Il ressuscita les fantastiques costumes d'antan... ».
Une partie de son travail fut publié dans une somme en vingt volumes intitulée : «The North American Indian», comprenant 2 500 photographies, 4 000 pages de textes, alors qu'au final, Curtis réalisa près de 50 000 prises de vue. Dans ce travail d'une vie, Edward S. Curtis a mis au service de la science ses dons d'artiste, ce qui confère à son œuvre non seulement des qualités ethnologiques, mais aussi artistiques et même spirituelles. Le résultat force l'admiration : ses photographies restituent la beauté et la grandeur d'un univers aujourd'hui mythique. A travers son objectif, Curtis a saisi les visages, les attitudes, les rites, les scènes de la vie quotidienne et de l'intimité, mais aussi les paysages, le cadre de vie et l'habitat de quelque quatre-vingts tribus. Son œuvre est un élément majeur de l'histoire des natifs sur le sol des Etats-Unis, mais elle constitue aussi un évènement et une première dans l'histoire de la photographie.